Archives ou records management ?
Boulet ou Mine d’informations à
exploiter ?
Deux approches fondamentales s’affrontent : le traitement des archives vu comme une obligation et donc comme une charge logistique de stockage, ou au contraire le traitement des archives vu comme une mine d’informations et donc comme faisant partie de son système d’informations, au sens le plus large du terme.
Dans cet article, nous
exposons ces différentes approches et donnerons quelques exemples d’outre-Atlantique
à ce sujet.
Que faire des archives
bancaires ?
Le but de cet article est de répondre à cette question délicate et parfois épineuse que de nombreuses banques se posent, ainsi que de rendre compte de nouvelles idées dans le domaine des archives qui proviennent souvent d’outre-Atlantique.
En effet, il existe une alternative entre deux grandes voies, dont les logiques contraires s’affrontent : d’une part, on peut considérer le traitement des archives comme une obligation ou comme une charge – bref, comme un boulet ! -, et on s’attachera donc davantage aux problèmes logistiques posés par le stockage de ces archives.
D’autre part, le traitement des archives peut être vu comme une mine d’informations s’intégrant dans le système d’informations de la banque, et même comme une source de revenus, vision plus proche de ce que l’on nomme aux U.S.A. le Records Management (ou la Gestion des Documents).
Quels sont les différents
types d’archives bancaires ?
Les archives bancaires sont
divisées en trois grandes familles :
1.
Les archives
comptables, caractérisées par une date comptable unique (par exemple les
chèques, les remises de chèques ou les compensations) c’est en général
l’ensemble des documents en provenance des agences.
Elles représentent près de
70% du volume globale des archives bancaires et se caractérisent par une faible
description intellectuelle.
2. Les archives des services, ensemble de documents générés par les
services de la banque. Ces archives représentent près de 10% du volume globale
des archives bancaires et se caractérisent par une forte description
intellectuelle.
3. Les dossiers de prêts ou de crédits. Ces archives représentent près de
20% du volume globale des archives bancaires et se caractérisent par une faible
description intellectuelle mais surtout par une forte sensibilité concernant la
bonne conservation.
L’approche
traditionnelle :
Dans un contexte
traditionnel, sans changements majeurs dans la structure de la banque et avec
un faible taux de contestations, l’approche
logistique, qui insiste sur la conservation des
archives bancaires plus que sur leur traitement, est satisfaisante.
Pourquoi donc insister sur
la conservation des archives ?
Tout d’abord, d’un point de
vue historique, il faut souligner que cette
tradition de tout conserver est inscrite dans les racines de la
France : ainsi, les premières archives d’état furent créées par Philippe
Auguste - en 1194 -, afin de garder une trace des actes de propriété, et
surtout des impôts (déjà à l’époque...) ; de plus, la France est célèbre
par son Ecole des Chartes, qui forme les conservateurs d’archives,
principalement destinés à gérer les archives nationales et départementales,
dont la longue tradition de gestion permet la réussite des recherches
généalogiques et historiques.
D’autre part, conserver est un impératif juridique :
en effet, la loi impose d’archiver les documents dans des «délais de
conservation» assez longs (par exemple dix ans), que l’on peut consulter dans
l’ouvrage du CFONB ; en outre, ces délais sont d’autant plus importants
qu’en droit civil, la preuve écrite est la règle : ainsi, il est déjà
arrivé qu’une banque perde plusieurs dizaines de millions de francs parce
qu’elle n’avait pas su retrouver l’acte de caution original d’un prêt !
Par conséquent, dans l’approche traditionnelle, et toujours dans l’optique d’une conservation à moindre frais, il suffit de noter sur le registre des archives les cartons ou boîtes d’archives, avec un minimum de description, et de les stocker dans un local de la banque ou chez un sous-traitant (un garde meubles).
Mais cette approche traditionnelle pose parfois des problèmes, essentiellement devant les situations suivantes :
· Lors
de fusions, absorptions, le traitement des archives est une tâche non
prioritaire et délaissée quelques temps. Lorsque la décision (ou l’urgence) de
traiter ce dossier surgit, il s’avère alors que les registres d’archives ne
sont plus à jour, ou que les systèmes de classement sont différents et non
adaptés à la nouvelle organisation et surtout que la mémoire humaine fait
défaut.
· Cette
solution demande aux services de faire la mise en boîtes de leurs documents.
Généralement, cette tâche est perçue comme une corvée et laissée aux
intérimaires d’été. Il s’ensuit donc une description et un classement léger,
voire douteux et une incapacité à retrouver rapidement le bon document au
moment voulu. Les gestionnaires sont donc amenés à garder un maximum de
documents dans leurs bureaux, et par voie de conséquence à occuper des m². Or,
dans l’élaboration actuelle des sièges sociaux, les surfaces de bureaux sont
strictement affectés, avec un minimum de personnel préposé au classement et aux
tâches administratives.
· Un
inconvénient majeur apparaît lorsque la durée de recherche est péniblement
longue pour un service à la clientèle : si une banque met trois semaines
pour remettre la photocopie d’un chèque à un client, elle peut difficilement
prétendre à un service de qualité et le facturer. Les archives apparaissent
alors comme une charge et non comme une source de revenus.
L’approche du Records
Management :
L’approche de Records
Management propose une exploitation plus dynamique des informations stockées
dans nos salles d'archives. Plus répandue outre-Atlantique, elle s’introduit
lentement dans nos organisations françaises.
Cette approche globale de
la gestion des documents archivés impose trois préalables :
· Le
service à la clientèle est une priorité.
· La
gestion des archives est informatisée.
· Le
réseau existe et relie tous les services de l’organisation.
Revenons donc aux
différents types de documents et analysons leur archivage sous l’angle de cette
approche.
1. Les
archives comptables sont stockés le
plus rapidement possible sur un site d’archives central, répertoriés par agence
et par date comptable.
Avec
une informatisation des versements et des espaces de stockage, ce service peut
retrouver tout document en moins de vingt minutes ! Cette performance
laisse envisager un meilleur service à la clientèle et donc une facturation
mieux acceptée. L’objectif de toute
réorganisation dans ce domaine doit être au minimum un équilibre budgétaire de
cette activité.
Le
graphe ci-dessous indique le nombre de demandes de documents selon la période
de stockage, exprimée en jours.
2. Les archives des services.
Un traitement adéquat de
ces archives, ainsi qu’une organisation moderne permettent de réduire les m² de
bureaux et de s’adapter aux nouvelles organisations de travail : moins de
personnel préposé au classement et une plus grande réactivité aux demandes de
documents.
Sous la bannière « Time to Market », plusieurs organisations
financières ont organisé une meilleure circulation des informations entre les
services et se sont intéressées au problème des documents archivés. Devant la
problématique des descriptions intellectuelles des documents, une norme
internationale est même apparue et son application permet réellement
d’atteindre ces objectifs.
3. Les dossiers de prêts ont une forte sensibilité stratégique, tant au
niveau du stockage que de la bonne organisation du classement et la rapidité
des recherches.
Ce caractère confidentiel leur confère une plus grande importance.
C’est pourquoi ils sont généralement classés dans un endroit à l’écart et sont
sous la responsabilité directe du service des prêts. En outre, ils sont souvent
rangés dans des dossiers individuels (selon le nom du client) et triés en
fonction de la date de destruction (dix ans après la date de fin de prêt).
Pourquoi ne pas numériser tous ces documents ?
Ce qui permettrait leur destruction immédiate, ainsi qu’un accès direct à l’information recherchée.
Numériser
est une solution très alléchante, mais se révèle concrètement balancer entre
l’utopie et le cauchemar, eu regard au caractère titanesque du travail à
accomplir : nul ne saurait accepter l’idée de numériser des millions de
documents alors que la consultation ne dépasse pas les trois pour mille des
documents conservés !
De
plus, une fois les documents numérisés, qui prendra la responsabilité de les
supprimer, connaissant les obligations juridiques évoquées ci-dessus ?
Conclusion :
Et en quoi la gestion informatisée des archives permet-elle alors
d’être plus efficace ?
La
gestion informatisée des archives permet avant tout plus de clarté et de transparence.
En
effet, est révolu le temps où les archives se devaient de ressembler à la cave
ou au grenier, et où tout était archivé en vrac sans tenir compte des délais de
conservation : on conservait, certes, mais sans pouvoir ni restituer, ni
éliminer !
Désormais,
la gestion informatisée permet de mieux ordonner les documents, et donc de les
retrouver plus rapidement. Cette diminution
du temps d’attente, et par voie de conséquence cette meilleure qualité de
service, sont bien entendu appréciées de la clientèle.
Mais
il s’avère qu’elles motivent aussi le personnel : tandis qu’auparavant,
aller chercher un document aux archives constituait presque une punition, celui
qui reçoit sur fax une copie du document quelques minutes après l’avoir demandé
apprécie à sa juste mesure la portée de cette gestion informatisée des
archives.
De
plus, à long terme, on s’aperçoit que la centralisation des demandes permet de
découvrir des erreurs de fonctionnement, parce qu’il est alors possible
d’analyser un ensemble plus cohérent de demandes ; alors qu’auparavant, une
agence recevait une plainte sur un sujet précis une fois tous les 6 mois, un
service où ces plaintes sont centralisées les recevra toutes les semaines, et
par conséquent cherchera plus sûrement la source de l’erreur.
Enfin,
et c’est un des points les plus importants, il est clair que le nombre de
demandes de documents est lié au nombre de réclamations. Par conséquent,
quantifier les recherches aux archives revient à quantifier la qualité du
service ; les statistiques des recherches, générées par la gestion
informatisée des archives et généralement transmises à la direction générale,
constituent dès lors un élément
quantitatif de qualité.
En
résumé, cette approche globale de gestion informatisée des archives apporte des
avantages certains :
· Un
recensement correct de l’ensemble des documents de son organisation :
aussi bien dans les services que dans les salles d’archives.
· Une
économie des m² de bureaux.
· Des
résultats pertinents lors de recherche d’informations.
· Un
meilleur service à la clientèle.
· Un
élément quantitatif de qualité.
· Un
coût relativement faible face aux solutions futuristes.